Le F-OMD aide à combattre la faim et la malnutrition en Mauritanie

 

Par  M.A. Boussery

Zénabou Mint Magha, 25 ans, vient de prendre place dans une longue file de mères qui amènent leurs enfants au centre de récupération nutritionnelle. Il est huit heures. Les premiers rayons du  soleil irradient la ville à moitié endormie, balayant dans le néant ses doux rêves de nuit. La fraicheur matinale a replié annonçant la chaleur torride d’une journée d’été embrasée. Nous sommes à 800 km  de Nouakchott, dans la ville d’Aioun, capitale du Hoddh Charghui.

Cette jeune mère n’hésite pas à raconter comment son unique enfant, souffrant d’une malnutrition aigue sévère, a été sauvée de justesse : «Lorsque je suis arrivée au centre, mon bébé avait 7 mois.  Ce jour là, que je n’oublierai jamais, j’étais abattue et désespérée, croyant qu’elle n’allait pas survivre. Elle était très faible, si mince qu’on pouvait compter tous ses os, avec un crâne déchevelé que son coup décharné ne supportait plus. Prunelles éteintes et visage pâle, Khadi agonisait…».

La bébé avait perdu toute force et tétait avec difficultés. « Pourtant, depuis sa naissance, elle s’était toujours  bien portée. Rien n’étouffait sa joie et un sourire radieux illuminait son visage doux et gai ». Sa santé, soupire Zénabou, «n’a pas connu d’ennuis jusqu’à  l’âge de  4 mois où elle a rapidement commencé à chuter.   Croyant que mon lait était insuffisant ou de faible qualité, j’avais décidé de lui donner en complément du lait d’animaux et des aliments prélevés sur le plat familial, composé uniquement de céréales… Depuis, Khadi a souvent eu la diarrhée.».

J’ai cru, ensuite, reprend Zénabou «que c’était parce que ses dents de lait allaient pousser. Mais sa situation se dégradait de jour en jour. Ma belle-mère m’a suggéré alors de consulter un guérisseur traditionnel, sans résultat. L’une de mes amies qui fréquentait le centre de nutrition m’a conseillé de m’y rendre le plus tôt possible.  Mon enfant a été rapidement  examiné par la dame du centre qui, après avoir mis un ruban multicolore autour du mince bras de Khadi, m’a regardé d’un air inquiet en me donnant un papier et en  m’orientant vers un centre de santé à proximité...» 

«Dès que j’y suis arrivée, mon enfant a été pesée et examinée par le médecin. Puis, s’adressant à moi,  celui-ci a dit : « votre enfant est mal nourrie, si elle n’est pas vite récupérée elle peut en mourir ». Il m’a donné alors des médicaments et un produit à goût de l’arachide, emballé dans un sachet à lui faire manger…  Je suis revenue plusieurs fois et lorsque mon enfant a repris un peu de force et de poids, le médecin m’a réorientée vers le centre de nutrition pour continuer le suivi de Khadi… ». 

«Je viens ici depuis quatre semaines. Aujourd’hui, mon enfant tète avec plus de force et d’appétit. On lui donne, en supplément, un mélange d’aliments nutritifs. Khadi est examinée tous les quinze jours. Elle a commencé -Dieu merci- à reprendre son poids normal… Mon unique enfant a été sauvée, j’en suis très heureuse et reconnaissante ». Moi, poursuit Zénabou, «j’avais une anémie, le médecin m’a donné du fer en comprimés et je me porte mieux, Dieu merci… ».

Le F-OMD a lancé dans l’est mauritanien, un paquet intégré d’activités visant à améliorer les conditions de vies des populations démunies à travers la réduction de l’insuffisance pondérale chez les enfants de moins de 5 ans et de la malnutrition chez les femmes enceintes ou allaitantes.  Ainsi, il a créé  1.700 sites offrant des services de prévention, de prise en charge de la malnutrition, de disponibilité et d’accessibilité géographique et financière des denrées de première nécessité.

Le programme a mis en place 160 centres de récupération nutritionnelle  pour les enfants malnutris modérés et aigus sévères,  qui fonctionnent  sans rupture. Ces structures ont pris en charge 23.000 enfants malnutris et 5.155 femmes anémiées. Des centres  de santé et de nutrition ont été dotés de médicaments et d’aliments riches en micronutriments et encadrés pour assurer des activités de sensibilisation et de démonstrations culinaires.

Ainsi, le dépistage systématique et actif et la prise en charge continue des malnutris ont  soutenu une bonne réponse à l’insuffisance pondérale et à la malnutrition. Le déparasitage généralisé, la supplémentation en vitamine A et la disponibilité des aliments enrichis ont permis une diminution perceptible de la vulnérabilité chez les enfants en bas âge aux déficiences en micronutriments.

La création d’unités mobiles de prise en charge des enfants et des femmes malnutris a permis d’assurer une plus grande couverture des populations ciblées, notamment dans les zones reculées ou enclavées.

Pour assurer la disponibilité des  aliments en été,  quand les familles ont épuisé leurs ressources, le F-OMD a renforcé de production locale. La formation en techniques culturales, la création de caisses de crédits et la fourniture d’intrants  et de semences ont favorisé le maraichage et les cultures céréalières. La production pour une superficie de 5,8 hectares de maraichage dans les deux Hodhs a été de 85,8 tonnes, soit un rendement moyen à l’hectare de 11 tonnes.

Le F-OMD a créé 178 sites ¨vivres contre travail¨ pour 17.320 personnes et distribué des dons en céréales dans 100 stocks villageois de sécurité alimentaire.  Ces dons ont servi à la mise en place de fonds de roulement pour les mutuelles villageoises de microcrédit et contribué au réapprovisionnement régulier des magasins  gérés par ces mutuelles. Les ménages démunis y empruntent leur nourriture, en période de soudure pour payer après les récoltes en cash ou en céréales. 

Pour contribuer à la régulation du marché des légumes afin d’éviter son engorgement au moment des récoltes, entrainant des pénuries en période de soudure, le programme a formé les  coopératives féminines à  la conservation et la préparation de jus et de confitures à base de produits locaux.

Les activités du programme ont été soutenu par un effort de communication intense : «Comme il y’avait plusieurs femmes qui fréquentaient les deux centres pour les mêmes raisons que moi », raconte  Zénabou Mint Magha, «les responsables nous ont expliqué que les enfants en bas âge et les femmes enceintes ou allaitantes, sont très vulnérables et courent souvent des risques de malnutrition et d’anémies. Ils ont donc besoin d’une alimentation variée, riche et équilibrée. Les agents nous ont appris les bonnes pratiques d’allaitement, de nutrition et d’hygiène. A l’âge de  6 mois, ils conseillent  l’introduction pour le bébé d’une alimentation complémentaire variée, nutritive et propre.  Certes, avec les  flambées de prix, il est difficile de se procurer des aliments nutritifs, mais nous sommes obligées de nous débrouiller. La santé à un prix et Dieu est grand…».               

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