Le F-OMD appui une révolution pour les agriculteurs égyptiens

 

Au moment de la vague du printemps arabe qui a déferlé sur l’Egypte au début 2011, la plupart des investisseurs avaient anticipé le chaos et ont pris la fuite. Ceci a eu pour conséquence une hausse du chômage déjà massif et a plongé l’économie du pays dans une incertitude profonde. Dans tout ce désordre, Mohamed Embarak, un agriculteur du sud de l’Egypte durement touché par la crise, y a immédiatement vu une opportunité.

Avec quatre autres personnes, Embarak a investi toutes ses économies et créé “Goodies for Agricultural Investment”, la première entreprise agroindustrielle de Haute-Égypte détenue par de petits producteurs.

“Beaucoup de gens pensent que le soulèvement en Egypte est une source d’instabilité. A mon avis, c’est le moment propice pour établir de nouvelles pratiques, des normes et une culture du travail nouvelle”, dit Embarak. Conseillé par une équipe d’agronomes et d’experts travaillant pour un programme des Nations-Unies financé par le F-OMD, “Goodies” s’est fixé comme objectif d’apporter une aide aux autres petits producteurs afin qu’ils puissent cultiver de façon collective des produits horticoles de qualité et de les relier directement aux marchés.

“Au moment où le pays retrouvera son équilibre, Goodies sera prêt à travailler aux côtés de grands producteurs et d’investisseurs privés qui, pour l’instant, n’osent pas s’engager dans la région, essentiellement parce qu’ils ne connaissent pas la culture ni les gens”, dit Embarak. “Mais nous, nous les connaissons bien et c’est notre avantage unique”.

Embarak et ses associés font partie des centaines d’agriculteurs bénéficiant de l’aide de ce programme conjoint de l’ONU, dont le but est d’encourager l’esprit d’entreprise et d’améliorer les conditions de vie en Haute-Égypte. Cette région ne comprend qu’un quart de la population égyptienne, mais elle regroupe les deux tiers des personnes vivant dans une extrême pauvreté et 95 % des villages les plus pauvres du pays.

Le programme “Chaîne de valeurs dans l’horticulture en faveur des pauvres en Haute-Égypte (SALASEL)”, qui comporte le mot arabe signifiant “chaîne”, vise à améliorer la place des petits agriculteurs dans la chaîne d’activités à valeur ajoutée qui comprend la production alimentaire. Il permet aux agriculteurs d’adapter leur production aux demandes du marché, à augmenter leur productivité et leur rentabilité en réduisant les pertes après les récoltes, et à revaloriser leur place sur les marchés de l’exportation et intérieurs en les aidant à établir des contacts directs avec les grandes entreprises agroalimentaires et de transformation alimentaire ainsi que les grossistes.
“Pour sortir les petits producteurs de la pauvreté, nous avons désespérément besoin de rompre la longue chaîne de commerçants intermédiaires qui ont pendant si longtemps écorné les profits potentiels des petits agriculteurs ; nous devons fournir aux petits exploitants un accès direct aux grands marchés”, dit Embarak.

Le programme offre des conseils stratégiques pour adapter leurs plans de production à la demande existante, une méthode déterminée par le marché et connue sous le nom d’“agriculture contractuelle”. “Goodies” prévoit de fournir des produits tels que des graines, des pesticides et des engrais pour alléger le fardeau financier qui pèse sur les agriculteurs durant les premières étapes de la culture. Des conseillers vont également aider les agriculteurs à commercialiser leur production pour s’assurer qu’ils recevront un prix équitable pour leur dur labeur.
“Associer des activités de commercialisation à une formation technique est une politique très efficace. Les agriculteurs travaillent dur, mais sont surtout habitués à utiliser des techniques de culture traditionnelles. L’agriculture contractuelle ouvre la perspective d’une garantie d’un taux de marge plus élevé en amont de la plantation : c’est une incitation très forte pour qu’ils adoptent de nouvelles techniques et des pratiques plus avancées”, dit Hany Nashed, le responsable marketing du bureau de Louxor du programme SALASEL, où travaillent six agronomes à temps plein.

Le programme SALASEL soutient également un centre de post-récolte dans le gouvernorat de Qena, parmi six autres où opère SALASEL, dans le but d’aider les agriculteurs de Goodies à réduire leurs pertes. Bien que l’Égypte soit le cinquième plus grand producteur de tomates au monde, ses exportations se sont effondrées de plus de 90 % au cours des 15 dernières années, essentiellement à cause de pertes massives des récoltes qui surviennent au moment de la post-récolte et du traitement.

Au centre de post-récolte, les agriculteurs se voient présenter de nouvelles techniques pour préserver la haute qualité de leurs produits grâce à un traitement et à un emballage approprié, ainsi qu’une formation à l’économie agricole axée sur la gestion et la réduction des coûts de production.

“Je peux maintenant lutter contre ces terribles ravageurs de cultures à un moindre coût. J’avais l’habitude d’acheter les pesticides les plus chers en pensant qu’ils étaient plus efficaces. J’avais tort” dit Hajj Aly, un fermier de 70 ans qui a récemment participé à un atelier d’une semaine organisé par SALASEL. Grâce à l’atelier, Aly sera capable de vendre sa production à un méga-marché allemand basé en Égypte.

SALASEL, qui s’engage également à renforcer le rôle des femmes dans le processus de production, collabore étroitement avec le Fonds F-MOD pour améliorer la vie des personnes les plus défavorisées au monde et aider des pays tels que l’Égypte à atteindre les Objectifs du millénaire pour le développement de réduction de la pauvreté.

“Grâce au vent de changement insufflé au moment de la Révolution du 25 janvier, la boule de neige roule encore bien plus vite que nous l’avions planifié ou imaginé”, dit Wael Rafea, directeur du Programme conjoint de SALASEL qui est une collaboration entre le gouvernement égyptien et quatre agences de l’ONU – l’OIT, le PNUD, l’ONU Femmes et l’ONUDI.

“Il est vrai qu’un modèle efficace peut entraîner un changement progressif, mais ce que nous avons , c’est une communauté active et enthousiaste. Plusieurs modèles sont déjà en train d’évoluer et de prendre forme. Et l’impact, je l’espère, sera plus profond et plus ample que tout ce que nous pouvons imaginer”.

Le fondateur de Goodies, Mohamed Embarak, affirme être convaincu que le programme SALASEL et le travail de Goodies vont générer la création de nouvelles activités, d’industries et le développement du commerce en Haute-Égypte, et qu’ils offriront un futur meilleur à ses trois jeunes enfants. “Cela signifie simplement que mes enfants auront de meilleures chances d’emplois quand ils grandiront… Pour moi, cette entreprise est plus qu’un simple investissement. Il s’agit de redonner espoir à ma famille, mes amis et à toute une communauté de petits agriculteurs en Haute-Égypte”.
 

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